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André Moumen Achour, 4 ème partie : l'abus de confiance

6 Mars 2021 , Rédigé par Hassani Mhamed Publié dans #articles et entretiens publiés, #articles parus dans le quotidien La Cité, #peinture et poésie, #poèsie et arts plastiques, #publié dans Kabyluniversel

 

L’élève et le maître

            André Moumen, c’est aussi l’attachement au Maître. Cette relation fusionnelle à distance, se traduit par une communication quasi-permanente. Je le découvris à la même période de la réalisation des œuvres sur la migrance. Moumen m’avait parlé d’un concours pour la réalisation de la statue de Massinissa, premier roi berbère connu, à Alger. Jusque-là, cela ne m’a pas accroché ne connaissant pas Monsieur Boulaine, ce compatriote qui vivait à Toulouse et qui était sculpteur, d’après ce que j’ai saisi. Moumen me disait qu’ils allaient réaliser cette œuvre comme un retour triomphant vers Alger qu’ils ont dû quitter sous la menace terroriste. Cela restait pour moi, un simple concours de circonstances et cela m’étonnait qu’on offre ce travail sur un plateau à d’illustres inconnus loin du bled, alors que les affaires se traitaient en coulisse, sur place. Je sais qu’on ne s’aventure pas à libérer la création artistique dans cette contrée. Elle n’est qu’un moyen de survie politique.

            Puis, un jour, dans la blancheur des neiges parisiennes, Moumen me parut sombre et agité. Que se passait-il ? Il me dit qu’Alger ne les avait pas retenus, alors qu’ils avaient fourni beaucoup d’effort, qu’ils se sont même déplacé à Rome, pour visiter le musée de la ville. Je commençais à dresser mes oreilles devant ces détails qui révélaient l’intérêt sincère et non matériel, de ces deux artistes pour la réalisation de cette œuvre…

            Il me parla de la déception de son Maître qui avait espéré revenir au pays par cette porte.   Je le sentais vraiment peiné pas pour avoir raté ce marché, mais surtout, pour la déception de son maître qu’il devait accompagner dans cette réalisation.

            Mais qui était ce maître ?

Je lui demandais de me mettre en contact avec lui, s’il voulait communiquer bien sûr, sur cet événement.

            C’est ainsi que je découvrais, par la voix, le Maître en sculpture, Boulaine Khoudir, originaire de Bejaia en Kabylie Algérie, par qui cette discipline est arrivée à l’école supérieure des beaux-arts d’Alger ! Maître Boulaine me conta sa révolte, ses déceptions et la nécessité de se réapproprier l’histoire artistique de notre pays. Cela fit l’objet d’un entretien fleuve paru dans un quotidien papier en Algérie et dans la presse électronique. Le titre en lui-même avait bousculé la hiérarchie algéroise : "Sur les traces de Massinissa ou l’arnaque algéroise."

          

L’abus de confiance :

            Aujourd’hui, en pleine troisième vague de la pandémie Covid-19, Moumen me parle d’une autre arnaque, cette fois parisienne. Je ne voulais pas me détourner de mon propos artistique, mais son désarroi devant ce monde sans pitié des arnaqueurs, ne me laisse pas indifférent.

            De quoi s’agit-il ?

            Pendant le chantier de la « migrance », André m’avait effectivement parlé d’un sponsor qui s’était engagé à lui réaliser le coulage de trois œuvres en cours. Il devait en réaliser deux copies originales de chaque œuvre : l’une pour le collectionneur l’autre pour les besoins de l’artiste qui doit aussi récupérer ses moules et bien sûr, recevoir une contrepartie financière. J’étais content pour lui et l’encourageais à la prospection d’autres débouchés. Je lui avais proposé le musée de l’émigration avec qui j’ai discuté l’éventualité de contribuer à leur revue à travers des textes et des photos des œuvres d’André Achour. Ça motivait un peu plus ma fréquentation quotidienne de l’atelier. Je prenais des vidéos, avec mon téléphone, où j’essayais de faire parler l’artiste pendant qu’il travaillait.

L’arnaque parisienne

            La pandémie nous a tous cloués dans nos périmètres privés. Depuis mars 2020, à la veille de rejoindre Paris, la fermeture des frontières me retint, depuis, en Algérie. Donc c’est de là, que j’ai appris la mésaventure de l’artiste plasticien André Moumen Achour qui me la raconta, alors qu’il sortait de sa convalescence due à la covid-19.

L’artiste se confie :

Parler de mon sponsor qui s’est avéré être un escroc me fait mal, parce que l’artiste n’aime que le beau dans l’humain. Il m’a été présenté lors d’une exposition collective à Choisy Le Roi. On s’est échangé les coordonnées. Par la suite, on se rendait visite réciproquement. Il appréciait les œuvres que j’avais réalisées et qui étaient entreposé chez moi. Il a surtout flashé sur deux discoboles grecs que j’avais réalisés à l’école supérieure des beaux-arts de Paris. C’est un collectionneur d’art amateur. À sa demande, je lui ai cédé ces deux merveilles pour un prix symbolique. Il m’a promi de me réaliser un atelier, mais rien à ce jour. On était devenu de bons amis. Il me promit de sponsoriser mes futures œuvres. Je le crus. Je l’en remerciais, naïvement, me voyant libéré des contraintes financières. Il insistait que dorénavant, il serait à ma disposition ! Pour un artiste, le sponsor est très important. J’étais confiant.

Plus tard, il a même essayé de me déposséder de ma propriété composée de ma maison et de son jardin. Il me disait qu’il allait tout raser et construire un bâtiment où j’aurais mon logement et un atelier. En attendant il me déménagera dans son atelier… Heureusement que je ne l’écoutais pas. Pendant tout ce temps j’attendais le coulage en bronze de mes œuvres, comme il s’était engagé à le faire. Chaque fois il me faisait patienter, pendant plus de deux ans et demi, maintenant ! Voyant que cela s’éternisait, j’ai demandé à récupérer mes moules ! À chaque fois que je lui en parle, il détourne la discussion et trouve des excuses pour ne pas les restituer.

À chaque fois je l’appelle il me dit toujours, au moins je vais t’en faire couler une en Bronze, d’autres fois, il ne me répond même pas au téléphone, même si je lui laisse un message. Il sait bien que je vais lui parler de mes moules. À chaque fois que je l’ai eu, il trouve une excuse pour dire n’importe quoi, mais jamais la vérité. Il cherchait à m’embrouiller.

Un jour il m’appelle, c’était au mois de mai 2020, il me dit je suis en Belgique, je lui dis je suis en train de couler un moule en poudre de marbre et du ciment blanc, je fais une expérience !

Il me dit : mais tu es toujours au travail ! Comme s’il me croyait découragé. Je lui répondis : oui, justement je fais cette expérience pour récupérer mes moules et pour les couler avec la même technique. Sa réponse par un « ah ! Oui ! » a trahi ses attentes. J’insistais pour lui faire comprendre que je tenais à mes œuvres et mes moules.

Alors, il lâcha : tes moules, ils sont partis dans la déchetterie. Depuis, j’ai tout essayé pour lui faire entendre raison. Il est allé jusqu’à me menacer de porter plainte contre moi pour diffamation et de me réclamer 50 000 euros de dédommagement !

C’est en juillet 2020 que j’ai décidé de porter plainte pour abus de confiance, après avoir pris conseil.

 

Question d’actualité :

            La question de la survie de l’artiste et de l’évolution de l’art dans sa splendeur revient quotidiennement au centre des débats sans pour cela trancher la question. On en demande trop à l’artiste englué dans ses visions. Il devrait y avoir des structures d’assistance juridiques et des centres d’accompagnement d’artistes porteurs de projets maturés.

            Puisse la justice rendre ses œuvres à André Achour qu’il puisse les exposer à tous les publics au leu d’enrichir le parc d’un particulier véreux.

André Achour au prise avec la fabrication des moules de ses œuvres

Mhamed Hassani

Poète dramaturge romancier

Chroniqueur culturel

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