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Ahellil n tira, gar yîtelli d u ass-a

4 Mars 2017 , Rédigé par Hassani Mhamed Publié dans #articles et entretiens publiés

Ahellil n tira

Du ballet des écritures

 

Dès ma prise de conscience que ma langue maternelle pouvait mieux exprimer mes états d’âme, je me suis mis à la transcrire dans les alphabets à ma portée. L’écriture chez moi découlait de la nécessité de visualiser mon état. Le penser ne me suffisait plus. Il me fallait le voir comme disait le poète, le voir, le sentir, le toucher pour ensuite le goûter.

Puis ce questionnement incessant sur l’inexistence de l’écrit dans ma langue maternelle.

Puis la découverte des isefra de Si Mouh ou Mhend à travers le livre de Mouloud Feraoun…

Mais le déclic est arrivé avec la découverte du TIFINAGH qui arrivait de nulle part. La clandestinité allait bien avec notre identité enfouie sous les apparences tapageuses du présent révolutionnaire des années soixante-dix qui préparaient l’homme nouveau !

Je me souviens que mes premiers textes étaient poétiques et théâtraux. Je me souviens que j’apprenais le tifinagh à des amis analphabètes et qu’ils l’apprenaient avec un plaisir jubilatoire, eux qui n’ont jamais été à l’école. Ils l’apprenaient les yeux scintillant en me disant « donc je peux écrire ce que je dis et ce que je pense sans connaître l’arabe ou le français ? Ils étaient emportés par cette possibilité de vivre en dehors de l’arabité et de la « francisité » ! Vivre librement sa berbérité son amazighité sans transiter par une autre langue, un autre miroir déformant, librement sans subordination aucune !

Ce poème Ili ! Né dans la tempête du printemps berbère de 80 résistera à l’oubli et au temps grâce aux caractères tifinaghs puis aux caractères latins.

Vivre pour lui, c’est ce va-et-vient entre l’oralité et l’écrit, cette dialectique du vent et de la matière qui sauve de la momification. L’un ne devrait pas se passer de l’autre, quand il y a rupture le danger de disparition pointe à l’horizon.

Vivre, pour ce poème c’est toujours passer d’un état à l’autre, de l’oral à l’écrit, de l’écrit à l’oral, d’une personne à une autre, un voyage incessant qui se passe de son premier locuteur, pour se fondre dans une nouvelle langue et revenir féconder le premier geste au coin du feu.

Donc ce n’est qu’à partir du moment que notre parole écrite passe dans une autre bouche et se passe de son premier émetteur qu’on est libéré de son angoisse. Quand l’autre se saisit de notre parole, il est temps d’avancer vers d’autres rivages libérés…

Livre présent

Livre ouvert

Livre livré au vent, livre agissant, livre vivant… Écoutez ces voix juvéniles et dites « ILI !koun ! sois ! » et dans toutes les langues.

 

Bgayet mars 2017

Mhamed Hassani

 

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