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Générale de la pièce Akham n Tiche par Mustapha Bensadi

19 Avril 2020 , Rédigé par Hassani Mhamed Publié dans #théâtre

 

  

La pièce a été présentée, jeudi, au théâtre régional de Béjaïa

 Générale de “AXXAM N’TICC” (Akham n’Tiche)

Dimanche, 19 Février 2012 10:00

Par : Mustapha BENSADI

 

         Écrite par M’hemed Hassani et mise en scène par Djamel Abdelli, la pièce intitulée Axxam n’Ticc (La maison de Tiche) a été présentée, jeudi en soirée et en générale, au Théâtre régional Malek-Bouguermouh de Béjaïa.

     Les trophées d’abord : cette pièce a obtenu le troisième prix du texte littéraire aux Olympiades culturelles et artistiques (nationales) de juillet 2009, un prix d’encouragement ainsi qu’une mention spéciale au Kaki d’or en 2010 à Mostaganem et, enfin, le prix de la meilleure composition musicale pour théâtre au Festival du théâtre amazigh (2011).

       Quant au synopsis, il faut savoir que Tiche était un colon français qui avait réaménagé un pan de ruines romaines en ferme, sa demeure, en fait. Et le nom de Tiche, quasiment indélébile, est demeuré, même bien longtemps après l’indépendance du pays, le sempiternel patronyme (et toponyme) du lieu, de la maison. Mais Mouhnif, fils de chahid, couve et cultive un rêve d’une telle intensité, à savoir substituer, un jour, le nom de son père Chahid à celui du colon (Tiche) “qui nargue son présent orphelin”. Mais il y a un Moussa plutôt (secrètement) réfractaire à cette perspective, un personnage au passé douteux que seul Abdellah connaît mais trop soucieux d’éviter une vendetta…

        De surcroît, ce Moussa est non seulement un nanti mais aussi dispose d’influentes relations dans l’administration. Alors que le seul et unique capital de Mouhnif se résume à l’amour de sa patrie lié aux idéaux de son feu père ; il a également un ami, Oufrin, mais ce dernier, se sentant “exclu de l’histoire et du présent de ce pays”, ne songe qu’à partir, partir… Et puis, enfin, Aemmi H’sen, le facteur… Dans un commentaire présentant la pièce, cette question : “L’histoire ira-t-elle dans le sens qui est le sien (logique) en ouvrant des perspectives, ou bien va-t-elle tourner en rond en fourvoyant de sains idéaux ?”

 

M.B

 

 

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GÉNÉRALE DE «AKHAM N TICHE» AU TRB MALEK-BOUGUERMOUH

19 Avril 2020 , Rédigé par Hassani Mhamed

GÉNÉRALE DE «AXXAM N'TICHE» AU TRB MALEK-BOUGUERMOUH

Les secrets de la Guerre d'Algérie

Lundi 20 Fevrier 2012

Par Boualem CHOUALI

Article paru dans le quotidien « l’expression »

un débat sans fin

«L'histoire ira-t-elle dans le sens qui est le sien en ouvrant des perspectives, ou bien va-t-elle tourner en rond en fourvoyant de sains idéaux?»

La générale de la pièce théâtrale intitulée Axxam N'Tiche (la maison de Tiche) écrite par M'Hamed Hassani et mise en scène par Djamel Abdeli, s'est tenue, jeudi en soirée, au Théâtre régional Malek-Bouguermouh de Béjaïa.

            Dans le prospectus présentant la pièce, une question résume toute la problématique et la morale posées: «L'histoire ira-t-elle dans le sens qui est le sien en ouvrant des perspectives, ou bien va-t-elle tourner en rond en fourvoyant de sains idéaux?» Le scénario de la pièce invite à un profond débat sur les secrets qui ont entouré et qui entourent toujours l'Histoire de la Guerre d'Algérie. A la veille du 50e anniversaire de l'Indépendance, la question d'ouverture des archives reste entièrement posée. Est-il nécessaire de dire les vérités une fois la plaie cicatrisée ou plutôt les dires et affronter la réalité en face. La problématique peut même être extrapolée aux questions du jour. Dire la vérité à temps quel que soit le prix pour mieux avancer, en somme.

             Mohnif, fils de chahid, a décidé de célébrer le 40e anniversaire de la mort de son défunt père dont les circonstances de la mort restent floues et non élucidées. Pour ce faire, étant reconnu pour avoir été un héros et valeureux chahid tombé au champ d'honneur au nom de la patrie, Mohnif sollicite, à cet effet, la contribution des autorités locales afin de dénommer au nom de son père la ferme de Tiche, une ruine romaine réaménagée en ferme par le colon Tiche. Deux gardiens veillent sur la ferme: Moussa le gardien de jour et Abdellah le gardien de nuit. Moussa refuse de voir une victime collatérale de son amour de jeunesse (Mme Tiche) réhabilitée, ce qui risque de dévoiler son passé douteux, marqué par une collaboration avec les colons qui a coûté la vie du père de Mohnif entre autres, en voulant sauver justement son amour secret, la femme de Tiche.

              Abdellah, l'autre gardien de la ferme, est un moudjahid authentique, témoin oculaire, survivant, s'est tu durant toute la période post-indépendance par peur de déclencher des représailles. Il a fini par se rendre amnésique en simulant parfois même la folie pour ne pas répondre aux curieuses interrogations de savoir ce qui s'est bien passé...
Le souhait de Mohnif de voir ladite ferme baptisée au nom de son défunt père, valeureux chahid de la révolution, s'est heurté au refus du «faux» moudjahid Moussa qui tenait à tout prix à garder le nom de sa bien-aimée. Pour arriver à leur fin, à chacun ses moyens. Moussa dispose de ressources financières et d'influentes relations dans l'administration, alors que Mohnif, armé de ses principes et convictions, n'a que son amour de la patrie et les idéaux de son père, et également un ami, Oufrin, mais ce dernier, se sentant «exclu de l'histoire et du présent de ce pays», ne songe qu'à partir. Le blocage de la situation quant à la réalisation du rêve de Mohnif, a provoqué l'ire de ce dernier, ignorant toujours la réalité des circonstance de la mort de son père, il partira brûler le bureau des moudjahines en réaction au refus de Moussa considéré toujours par Mohnif comme un vrai moudjahid. Par inadvertance, Abdellah avoua les faits en dénonçant Moussa...Mohnif décida alors de se venger...mais Abdellah, en moudjahid convaincu, a dissuadé Mohnif de renoncer à l'irréparable au risque de réhabiliter par la mort, Moussa le faux moudjahid....

 

B.C

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Enferment évolutif 2 Le couple de pigeon

19 Avril 2020 , Rédigé par Hassani Mhamed Publié dans #articles parus dans le quotidien La Cité, #articles et entretiens publiés, #publié dans Kabyluniversel

 

Le couple de pigeons

     

     

     J’en viens à l’objet de mon propos. Oui, je voulais parler de ce couple de pigeon qui vient d’élire domicile dans la cage d’escalier ; sur un bord de quelques centimètres, il a bâti son nid. Je m’en suis rendu compte hier matin. C’était mon jour de sortie pour les commissions. Je les ai trouvés affairés quand ils m’ont vu sortir, du néant pour eux, ils se sont arrêtés, m’ont scruté un bon moment où j’étais moi-même figé. Quand ont-ils eu le temps ? Me dis-je surpris. J'ai appelé ma femme et lui montrais l’œuvre. Elle s’est exclamée : ils vont nous salir la cage ! Bien sûr, elle pensait cage d’escalier, mais le fait qu’elle s’arrêta là, me fit rire à l’intérieur : oui, il s’agit bien de cage pour nous. Eux, ils s’en servent seulement pour se reproduire. Elle m’ordonna de le détruire avant qu’elles n’y mettent leurs œufs. Elle me ramènea un balai. Dès mon geste vers eux, les deux pigeons battant des ailes, sortirent par une ouverture provoquée…

          Une autre histoire de voisin de palier. Un émigré qui a racheté ce logement pour y passer ses séjours au pays. Originaire des hauts plateaux, il ramène sa famille périodiquement aux vacances d’hivers, printemps et été. Et aux dernières vacances d’hiver, il s’est mis en tête de réchauffer son appartement au gaz de ville, moins cher que l’électricité. Il cassa son mur donnant sur la cage et mena son tuyau d’évacuation jusqu’à la façade extérieure qu’il dut casser aussi. J’étais arrivé au mauvais moment. Je me mis en colère en lui expliquant qu’il n’avait pas le droit de toucher aux parties communes ! Et j’ajoutais « pourtant vous revenez d’un pays où ces choses-là sont strictes ! » Il me dit qu’il n’avait pas pensé à ça, qu’il n’allait pas le faire, qu’il annulait cette perspective. Il abandonna l’ouverture pratiquée sur la façade extérieure, béante, ramassa ses échelles et ses marteaux et je ne l'ai plus revu depuis.

          Et aujourd’hui, les pigeons s’y glissent à chaque saison. Je les chasse quotidiennement les empêchant de nicher. Cette année, ils ont profité de ce confinement pour me prendre de vitesse. Donc je détruis le nid de broussaille, une fois les pigeons partis.

           Vous voyez, en temps de confinement tous les détails remontent en surface. Les histoires de voisins, de pigeons, de mendicité et d’insécurité. Bah, la mort qui nous attend se fait oublier grâce à ces détails.

           Je reviens à l’essentiel de cette chronique, les pigeons dont on a détruit le nid dans la cage d’escalier.

         

  Le lendemain après-midi, ma femme s’aventure sur le palier à mon insu, ce qui est rare depuis cette pandémie. Elle m’appelle, scandalisée, pour me dire : regarde ! Les pigeons ont reconstruit leur nid et il y a déjà un œuf pondu !

           J’arrive et constate la chose. Vraiment surpris de la diligence de ce couple ailé. En vingt-quatre heures, tout est remis en place et l’œuf en plus. Ma femme, très superstitieuse et respectueuse de la vie, m’ordonne de laisser la couvée se poursuivre, puisque la chose est faite. Au fond de moi, j’en ris, émerveillé par ce couple têtu. Nous retournons dans notre cage, laissant le couple roucouler, à son aise.

 

Avril 2020

Mhamed HASSANI

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spectacle théâtral "Akham n Tiche"

18 Avril 2020 , Rédigé par Hassani Mhamed Publié dans #théâtre

 

suivez le lien pour voir la pièce

1 ère partie:

tamezgunt n Mham:ed Hassani yessuli Uxxam n Umezgun n Bgayet "Akham n Tiche"

https://youtu.be/0ml9_lS9gf0

2 ème partie:

https://youtu.be/0ml9_lS9gf0

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Enferment évolutif

18 Avril 2020 , Rédigé par Hassani Mhamed

Enfermement évolutif

       

        

     

              J’habite un logement de type évolutif, dans la cité des 99 logements évolutifs. La dénomination des cités est hallucinante en Algérie. Les chiffres font office d’identité anonyme. Je n’ai jamais compris pourquoi. Cela prouve l’absence complète de désir d’habiter chez les concepteurs de ces cités numériques. Elles ne sont pas destinées pour les concepteurs ni les réalisateurs ni les programmeurs, mais pour une masse anonyme qui s’engouffrera, sans se poser de question, dans ces cubes de béton, pour cacher sa misère. Cette population défavorisée se jettera sans réfléchir dans ces chantiers qu’elle habitera, selon ses moyens. Certains rapaces se seront sucré au passage, en s’en réservant un à revendre au plus offrant, et iront ailleurs bâtir leur espace, qu’ils habiteront très mal ou jamais, parce qu’ils sont trop occupés à capter l’argent facile.

      Habiter un logement évolutif dans une cité évolutive, sommes-nous des êtres évolutifs ? Allez m’expliquer cette définition ! Évolutif ! Cela renvoie-t-il à l’histoire de l’humanité ou tout simplement à l’histoire de l’habitation humaine ? Nos dictateurs éclairés ont usé de toutes les formules pour essayer de résorber le problème de l’habitat en Algérie. Grand challenge qui revient à chaque changement d’équipe gouvernementale ! Le cheval de bataille d’un système de gestion basé sur la rente pétrolière. Comment redistribuer la rente et se servir au passage ? La bonne équation ! La formule n’était pas chère mais a donné naissance aux nouveaux bétonvilles [1] !

       

        Ce que je sais, tout bénéficiaire d’un logement, quelle que soit sa dénomination ou la formule d’attribution ou d’acquisition, est chanceux, au pays du million et demi de martyrs, formule consacrée pour mettre en valeur notre nationalisme. Quand le bénéficiaire n’est pas nécessiteux, il ne voit pas l’abri mais la somme qu’il représente sur le marché de l’immobilier. Le logement est devenu le capital départ de beaucoup. Et depuis que j’ai bénéficié de cette carcasse, mon évolution a commencé, sur une soixantaine de mètres carrés, entourés de murs. Vous avez une adresse, point. Évoluez à l’intérieur comme vous voulez ! C’est depuis, que je cohabite avec les pigeons.

          Bon, il ne faut pas trop se plaindre, j’ai eu mon toit évolutif ! Soixante mètres carrés que je devais faire évoluer ! Eh bien, je l’ai fait évoluer vers un duplex, sans complexe mes amis, puisque le tirage au sort m’a fait tombé sur le dernier étage ! Tiens, par exemple mon voisin du rez-de-chaussée a évolué en largeur, il a débordé sur l’espace vert dont personne n’a jugé de l’utilité ! L’autre, en face, a fermé l’entre bâtiment pour en faire un abri pour son véhicule, il a dit que c’était pour la sécurité de la cité. Puis petit à petit, toutes les ouvertures furent fermées et les espaces verts annexés et la seule entrée de la cité fut dotée d’un portail géant. Les résidents se frottèrent les mains de satisfaction ! Nous voilà en sécurité !

        Le bac à ordure était dans la cité, jusqu’à son débordement quotidien et à l’occupation de tous les trottoirs, qui fit réagir les plus touchés. Il fut supprimé tout simplement et les ordures s’éparpillèrent un peu partout aux alentours de la cité ! Les plus conscients prirent leurs déchets jusqu’à la prochaine décharge qui déborda à son tour sur la ville…

       On fit des assemblées de résidents pour trouver la solution, mais d’aucuns ne voulaient prendre le droit chemin de l’organisation. Un syndicat d’initiative ou une association pourrait bien régler la distorsion ! Mais chacun voyait cette solution comme un avantage du président, qui pourrait les attaquer sur leur dépassement ! Donc ce n’était pas la solution ! 

       Timide, j’observais la contre évolution jusqu’au confinement, chacun dans son irrésolution et ses contradictions.

        Maintenant, que nous voilà en confinement pandémique, chacun sent l’incurie et la désolation. Qui va oser s’inquiéter de son voisin ou de son prochain, tellement les liens se sont distendus à cause d’un trottoir ou d’un vide sanitaire, un espace vert ou une ouverture…

à suivre : Le couple de pigeon                      

avril 2020

Mhamed HASSANI

 


[1] Le sociologue Sidi Boumedienne, auteur de « Bétonville contre Bidonville » indique que le terme de “bétonville” est un néologisme qui désigne toutes ces nouvelles cités-dortoirs construites en dehors des grandes villes.

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Le nouvel ordre

16 Avril 2020 , Rédigé par Hassani Mhamed Publié dans #articles parus dans le quotidien La Cité, #publié dans Kabyluniversel, #articles et entretiens publiés

Le nouvel ordre

            À coups de condamnation et d’angoisse, d’enterrements sans condoléances, le nouvel ordre s’annonce. Il a trouvé son terrain favori fait de morgue et d’incurie.

                Il se régénère et se consolide, à coups d’interdiction et d’ordonnance, pour notre bien et celui de notre descendance.

                 Il se met en place dans le silence des confinements sanitaires, d’encadrements sécuritaires et de réseaux satellitaires. Il interdit les révoltes solitaires sur les réseaux sociaux, les TV libertaires, les journaux volontaires et autres supports de mots dissidents.

               Il racole pour son avenir fait d’autorisation et d’interdiction, d’autoflagellation et de soumission, d’où seront bannies l’innovation et la passion, le libre arbitre et la libre expression.

              L’être humain n’est plus qu’un animal social qu’il faut dompter, pas éduquer. Il n’a de bon que ce qu’on l’oblige à faire, sinon son animalité reprend le dessus. Pas d’auto-confinement ni auto-organisation, c’est mauvais pour sa domestication et préjudiciable à sa castration.

        Le nouvel ordre vous prend vos mots et vos rêves, bouleverse vos définitions, renverse vos intentions et célèbre vos retournements. Il tire plus vite que votre sincérité, conjugue à sens unique tous les verbes en avoir et accorde l’être à son bas-fond.

            Alors courage, mettez un peu de rage dans l’amour à votre entourage, ne le laissez pas tomber, aidez-le à se relever, à reconquérir sa verticalité et à regarder au loin.

           Quand viendra l’heure de sortir, leur arsenal sera fin prêt et nous, nous aurons toujours une longueur d’avance, parce que nous sommes porteurs d’un virus encore plus dangereux pour eux : le virus de la désobéissance !

Avril 2020

Mhamed HASSANI

Écrivain

 

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Enfermement 2 - le couple d'enfants

11 Avril 2020 , Rédigé par Hassani Mhamed Publié dans #articles parus dans le quotidien La Cité, #publié dans Kabyluniversel, #nouvelles littéraires, #articles et entretiens publiés

Enfermement 2

le couple d’enfants

 

     

         En plein confinement pour cause de pandémie covid-19. Avril 2020. Le silence a gagné la contrée, le quartier, le bâtiment et même les appartements. Le couple fait sa promenade, de salon en chambre, de chambre en salon, puis, de temps en temps, aux toilettes. La télévision est éteinte. Le silence gambade dans l’appartement, le bâtiment, la cité, la ville, le pays et toute la planète. Les couples font leur promenade d’intérieur, séparément. Il leur arrive de se croiser dans la cuisine.

     

        Soudain, la sonnette de l’appartement, comme une sirène d’alarme, déchire le silence. Le couple s’immobilise, chacun est figé à une extrémité du salon. Lui est devant la porte d’entrée. Il se précipite pour coller son œil à la lorgnette de la porte. Qui ? Qui ? Il voit un visage tout proche, jeune, souriant à quelqu’un d’invisible. Il entrebâille la porte et lui demande : que viens-tu faire ici ? Tu devrais être à la maison ! Alors, il découvre la deuxième présence, une jeune fille enfoularée. « Rentrez chez vous, ne traînez pas ici. Partez partez ! »

      Le couple d’enfants se retourne, apeuré, pour redescendre l’escalier, hésitant. Lui les poursuit de son « rentrez chez vous » d’un ton qui se veut paternel, mais qui suinte la peur et la colère ! Le couple d’enfants redescend l’escalier, presque à reculons, attendant sûrement un rappel. Lui rentre et ferme la porte, essoufflé. Sa femme, statue figée à l’endroit, lui demande : De quoi s’agit-il ? Il répond en bégayant : Des enfants qui jouent ! Puis il se précipite vers la fenêtre donnant sur la cour de la cité. Il voudrait suivre la trajectoire du couple d’enfants, comprendre son intention.

        Au bout d’un moment, les voilà qui sortent de l’ombre pour traverser la cour vers l’autre bâtiment. La jeune fille enfoularée traîne un chariot à commission qui paraît vide. Le gamin marche devant comme un éclaireur. Ils mendient sûrement, se dit-il, angoissé. Il ne les avait même pas questionnés ! Il aurait pu leur offrir quelque chose, en profiter pour leur demander des nouvelles de l’extérieur… Ils rentrent dans le bâtiment d’en face pour en ressortir en courant et en surveillant leurs arrières, comme s’ils avaient été chassés ! La cité est fermée et les deux petites silhouettes déambulent, agitées par le vent qui balaye, silencieusement, ce monde déserté. Les deux ombres, virgules sombres, slaloment entre les bâtiments rigides, avant de disparaître. Un monde mourant qui n’a plus rien à donner au futur ; un monde qui reste confiné dans l’attente de la mort. Marmonne-t-il, derrière sa vitre, le regard perdu dans le ciel gris déchiré par quelques rayons métalliques d’un soleil d’outre tombe, en cette journée pandémique.

          Il a honte et pense qu’il n’aurait pas l’occasion de se rattraper, ni d’en savoir plus sur le monde extérieur. La peur habite les cœurs au point de les induire en erreur. La peur, diffusée par tous les réseaux, a fini par fermer les portes de la solidarité humaine, raison d’être de nos sociétés. N’est-ce pas ? Jamais, au grand jamais, il n’avait fait un tel geste ! Renvoyer des enfants qui chercheraient de quoi manger ou nourrir leur famille ! Il conclut que la peur qui a ressurgi au gré de la pandémie, archaïse la société, la fait retourner à ces impulsions primitives. On n’arrête pas de nous mettre en garde contre les voleurs et les agresseurs, à toute heure, de jour et de nuit. Il paraît même que les enfants sont des porteurs sains de ce virus mortel ! Et voilà le résultat ! On se méfie, on se justifie et on rejette plus faible que soi ! Et demain, on se débarrassera des charges inutiles, dans la froide logique induite par la nécessité !

          Au fond de son être, il souhaite très fort, les voir revenir et réparer son geste dicté par la peur irraisonnée.

         Le soir, le gouvernement annonce un confinement total, pour le lendemain, sous surveillance militaire, compte tenu du non-respect des consignes et des risques de dépassement sur les biens d’autrui.

        Beaucoup se sont repliés vers leur village natal, en campagne. Un geste de survie, croyant éloigner le danger en se réfugiant au berceau.

       Il se rappelle avec nostalgie la vie de tadart, de son village en montagne ; cette méfiance et cette peur n’existaient pas. Les maisons étaient ouvertes, jamais complètement fermées, on ne s’imaginait même pas être agressé chez soi. Maintenant, la ville, la cité comme une jungle ne pardonne pas les négligences sécuritaires.

         Une fois, il a voulu chasser des jeunes qui occupaient le hall d’entrée ; mal lui en prit, il se fit insulter par la bande qui cuvait son vin, en cachette. Ils lui dirent qu’il n’était pas au village, qu’ici il devait s’occuper uniquement du seuil de sa porte, pas de l’entrée du bâtiment. Il revînt sur ses pas, chez lui, prit un manche à balai et redescendit vers eux. À sa vue, ils prirent la fuite. Le vieux ferma le portail d’entrée et remonta chez lui. Il n’y avait et il n’y a toujours pas d’organisation pour la propreté et la sécurité des cités. Les habitants sont récalcitrants à toute organisation, parce que chacun enfreint la loi, là où ça l’arrange. L’enfermement est dans les mentalités avant d’être dans la cité, conclut-il en rejoignant son fauteuil face à la télévision qu’il a en horreur, mais que sa femme s’entête à allumer pour entendre la mort, ânonner en direct.  

Mhamed HASSANI

Prochaine chronique:  Enfermement 3 - le couple de pigeons

 

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Enfermement

5 Avril 2020 , Rédigé par Hassani Mhamed

Enfermement

   

 Je ne veux plus sortir, je ne sors plus. Se dit-il à chaque retour de l’extérieur. À chaque expédition, il revient bouleversé. Dès qu’il traverse le seuil de sa demeure, il sent un fourmillement sur tout son corps. Il a beau enlever ses vêtements, se laver toutes les parties exposées à l’air libre, il sent l’être invisible lui palper le corps à la recherche d’une issue pour pénétrer. Il a peur. L’angoisse de souffrir, de mourir ? C’est quoi la mort ? Est-ce elle qui fait peur ou la perspective de souffrir ?

 

   Quand il se prépare à sortir, par nécessité se dit-il, il est tout excité de se retrouver seul dans la rue, un certain temps. L’air est pur et le silence saint. La nature est vivante et l’homme absent. Il marche léger comme en apesanteur. Aurait-il perdu son poids ? Il avance en flottant dans l’air qui s’est un peu solidifié. Puis, arrivent les endroits vivants, fréquentés, où la nourriture est concentrée. Oui, il y a cette impression que ce sont les éléments qui se déplacent. Là, des groupuscules d’êtres humains devant chaque magasin. Il découvre une chaîne humaine, grand serpent qui enlace plusieurs bâtiments de la cité. Un mètre sépare chacun de l’autre. Ils faisaient la chaîne pour acheter quelques sachets de lait. Il est tenté mais se ravise ; contourne les bâtiments, se retrouve de l’autre côté de la chaîne mâle, face à un magma de femmes qui ne respectent aucune distance. Le virus s’attaque t-il qu’aux mâles ? Il se dirige vers le boucher où une seule personne était visible à l’entrée. Il s’arrête à deux mètres de la personne, mais constate qu’à l’intérieur il y avait quatre bonnes femmes qui discutaient en attendant qu’elles soient servies. Il continua son chemin vers le marchand de légumes qui a ses étalages à l’extérieur. Il prend un sachet, se choisit quelques oranges qu’il dépose sur la balance électronique. Le jeune homme, derrière la caisse, lui donne un chiffre et le vieux lui remet un billet et attend calmement sa monnaie qu’il recueille dans un sachet en plastique transparent qu’il tend au marchand. Le jeune marchand sourit de ce geste de protection.

      Non, il ne sortira plus, il mangera ce qu’il y a, il se suffit de peu, mais il ne sortira plus s’exposer à ce machin couronné. Il suffit de l’évoquer, il sent sa présence se manifester sur son corps. Rester confiné ; il paraît que c’est le seul remède. S’enfermer et attendre. Retour à la case départ. Rien ne sert de courir, de s’enorgueillir de son épaisseur matérielle, de se flatter d’être un humain émancipé de son ancêtre, le singe. Le voilà enfermé, pendant que les animaux reprennent de la liberté. Retournement de situation. Nous voilà pris à notre propre piège.

      Mais, l’être humain, s’est-il jamais rendu ? A-t-il jamais renoncé ?

Mhamed HASSANI

5 avril 2020

 

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journal d'épi-demain

24 Mars 2020 , Rédigé par Hassani Mhamed Publié dans #articles et entretiens publiés, #articles parus dans le quotidien La Cité, #publié dans Kabyluniversel, #renouveau culturel

Journal d’épi-demain

     

Y en a qui ont mis en route un journal de confinement, notant dans le détail leurs pérégrinations quotidiennes dans l’espace qu’on leur a alloué ou qu’ils se sont alloués.

       Chacun redécouvre sa condition supposée dans une société confinatrice malgré son semblant d’ouverture sur l’autre.

     Il parcourt des yeux le cumul de sa vie en matériel inutile, en confort absurde qui ne le protège de rien. Il parcourt à pied, en comptant les pas, son appartement qu’il a arraché par la force de ses relations même au bas de l’échelle sociale. Il s’amuse à diviser le nombre des années par le nombre de pas, trouve que le rapport était ridicule. Chaque pas lui a coûté tant d’années de labeur et beaucoup de misères morales.

    Lui n’arrête pas de triturer les commandes du confort acquis, mais n’arrive pas à en sentir l’apport sur sa santé en sursis. Alors, il se lève et prend un verre d’alcool pour retrouver le confort qu’il s’était imaginé. Rien à voir, comme si le clown se donnait en spectacle devant une salle vide. Même pas un miroir !

   Puis, y a ceux qui ont mis en route un journal de non-confinement, notant les détails de l’évolution épidémique dans son rayon, mettant en relief les comparaisons pandémiques, alignant des chiffres que le temps traduira en courbe.

   Y en a qui oublient que ces chiffres sont des êtres humains qui s’allongent chaque matin pour ne plus prendre leur petit déjà en famille. Ils servent des statistiques pour la postérité.  

     

     D’autres notent, pendant leur pause, l’effort qu’impose cette pandémie. Il note son envie d’être chez lui, à bercer ses chéris. Mais, quand il a choisi ce métier, il savait ce qui l’attendait, entre bonheur et malheur, l’être humain ce déséquilibré, a toujours besoin d’être sauvé pour continuer son bonhomme de chemin. Il note ce regard qu’il vient de réanimer. Une fierté profonde gonfle sa poitrine et le fait retourner dans la salle des urgences. Chaque vie mérite d’être sauvée, il n’est pas juge, il est médecin ou sapeur-pompier.

 

Y a les confinés politiques, dans les prisons, que personne ne revendique en cette saison ; pendant que beaucoup gèrent le présent, d’autres surveillent le futur, comme au bon vieux temps de la guerre de libération.

 

 

 

     Puis, le poète s’insurge et confine son verbe de panurge pour libérer son esprit des jérémiades. Il a besoin d’espace en contrepartie de son économie de mots. Hier encore on le maudissait pour ses extravagances ; aujourd’hui on le caresse pour lui arracher un bon présage.

      L’artiste se rétracte, ne sait s’il fait journal ou récital. Il opte pour un direct optimal sur la toile ; partagez sans rechigner ce nouveau régal pour les confinés du journal, Covid-19.     

Prenez journal, confit ou pas, notez vos impressions, ça servira après, pour en rire ou en pleurer ou simplement témoigner.

Mhamed HASSANI

Écrivain

 

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Publié depuis Overblog et Facebook

18 Mars 2020 , Rédigé par Hassani Mhamed

Nos « certidoutes »

 

«… J’écris, j’écris, j’écris… l’exil intérieur, la prison à ciel ouvert, la libre expression ; mes ‘certidoutes’. » José Vala

Dans mes déambulations bougiotes, je croise souvent le regard lointain de Gomes[1], le président-écrivain portugais qui renonça, de son plein gré, à sa charge, pour s’exiler en Afrique du nord. Arrivé à Bougie, il ne put se détacher des charmes de cette ville côtière, où art et culture se conjuguent avec l’accueil chaleureux des habitants et de la nature. L’avènement de la dictature de Salazar[2] au Portugal (1932-1968) rendit cet exil définitif. Il mourut en 1941, face à la baie bleue de la Méditerranée qu’il admirait sans relâche du balcon de sa chambre d’hôtel de l’ex-place Gueydon, devenue place du 1er novembre, à Bejaia. Depuis quelques années, son buste occupe le devant de la place Lumumba[3] à une encablure de-là. Une place et un buste qui se tournent le dos. Il faudra interroger un jour cette promiscuité que seule l’histoire des gabegies gouvernementales du pays pourraient expliquer. Superposition de noms qui se disputent les mêmes espaces. Une histoire en mille feuilles. L’émergence citoyenne a transformé l’espace en rendez-vous hebdomadaire des arts de la rue ; une bouffée d’oxygène pour les enfants, qui se lâchent dans les couleurs et les notes de musique, et les adultes qui préparent leurs slogans politiques pour les prochaines marches de la révolution en cours.

Aujourd’hui, je suis attiré par un trio de gamins qui dessinent au pied du buste de l’exilé de Bougie, en riant fort. Pendant que je me rapproche de la scène, je crois voir le visage de Gomes s’animer. Son regard me fait penser, étrangement, à celui d’un ami, artiste poète, croisé à Paris, dont je viens de terminer la lecture de ces deux recueils de poésie qu’il m’a fait parvenir. Eh bien, je vais vous parler de ce dernier, puisque le premier est déjà dans l’histoire.

Parler de mon ami, José Vala, au profil d’oiseau migrateur, aiguisé par les vents de la révolte, c’est comme parler de soi et de tous ces aèdes croisés, par-ci par-là, autour de la Méditerranée. Ils ont le cœur chaud et le regard brillant de joie mêlée de tristesse crépusculaire.

Nous nous sommes rencontrés dans un melting poètes, comme sait les organiser notre ami commun Eric Dubois, cet autre poète émérite de Joinville le pont en île de France, qui se bat, bec et ongles, pour rendre à la poésie sa place dans les médias.

C’était un jour de drame en Algérie, la junte au pouvoir venait d’assassiner le grand militant des droits humains en prison. Kamal Eddine Fekhar[4] venait de décéder après une ultime grève de la faim, en plein mouvement citoyen déclenché le 22 février 2019. J’étais accablé, fébrile, je ne savais plus si je devais continuer ce récital collectif à l’Agora, cet antre privé, de la culture au cœur de Paris, en gardant pour moi cette terrible nouvelle ; ou fuir pour ne pas perturber le bon déroulement de la rencontre ? Je regardais autour de moi cherchant un improbable soutien. Je me suis rapproché de Marie Volta, chanteuse d’origine catalane, elle est aussi poétesse et autrice de plusieurs ouvrages, qui porte à bras-le-corps un destin aussi lourd que le cheminement de l’espèce humaine. Connaissant son engagement, je l’ai informé et lui ai expliqué mon attente. Nous interpréter un de ses textes adapté à l’évènement dramatique que vivait mon peuple. Elle absorba un bol d’air en se parlant à elle-même comme pour se concerter, revint vers moi et me proposa de chanter une chanson dédiée aux détenus politiques catalans, en langue catalane, me précisa-t-elle. C’était à propos. Nous fîmes un petit texte de présentation, qu’elle lut à l’assistance pour expliquer son changement de programme.

Les accents catalans faisaient écho à tous les autonomistes dans le monde qui luttent pour leurs droits à l’épanouissement identitaire et appelaient à la libération de tous les détenus politiques.

Quand mon tour de déclamer arriva, j’étais encore sous le coup de l’émotion. La poétesse Laurence Duvet, évanescente et profonde, se chargea de déclamer quelques extraits de mon livre citoyen.

Puis s’est ensuivie une vente dédicace de nos recueils respectifs. C’est alors que José s’est approché de moi, comme un enfant silencieux au regard timide et espiègle, pour me solliciter une dédicace de « L’ivre citoyen ». Pendant le temps de la signature, José me parlait d’artistes algériens qu’il a fréquentés, notamment de l’artiste Djamel Allam qui venait de rejoindre le ciel après nous avoir légué le miel de son être.

Ma tristesse se dissipa dans les regards croisés des autres artistes qui rivalisaient de révolte contre les injustices dans le monde.

Voilà pour le cadre de ma première rencontre avec José Vala. Sa silhouette fragile que compense son regard plein d’énergie, continuera à flotter dans mon subconscient. Quelque part cette silhouette m’était tellement familière qu’elle vient de ressurgir sur la place Lumamba avec sa guitare. Elle chante « tella temkant deg ul iw »[5] (il y a une place dans mon cœur) et toute l’assistance mixte reprend en chœur…

Sur les réseaux sociaux, José partage sa poésie engagée et sa voix nostalgique. Un jour, j’ai demandé à un ami[6] de traduire un de ses poèmes en kabyle. Ça été fait et diffusé sur le Net. José était émerveillé d’exister dans une autre langue, surtout dans la langue de Matoub[7], à qui il rend hommage dans l’un de ses recueils.

On devait se revoir en début d’année, malheureusement la grève des transports parisiens en décida autrement. On reporta la rencontre pour plus tard, puisque j’ai fui l’enfer parisien du moment, pour replonger dans le mouvement citoyen, ce fleuve tranquille qui entraîne l’Algérie vers son destin énigmatique.

Aujourd’hui, c’est le fameux coronavirus qui provoque la fermeture des frontières. La 3e guerre mondiale était-elle engagée, via un virus ? Mondialisation oblige, nous en partageons toutes les retombées. Les continents sont plongés dans une fiction biologique qui nous contraint à l’isolement. Le mouvement citoyen n’écoute que sa propre logique. Il continue à scander ses idéaux tout en cherchant comment résoudre ses contradictions. Le pouvoir est prédateur, seul sa survie l’intéresse. La méfiance, de part et d’autre. Le virus risque de profiter de la faille. Inquiétude. Basculement lent mais irréversible vers l’action préventive.

 

J’ai dégusté la poésie de José comme deux verres d’eau-de-vie. J’y retrouve mes plats épicés aux orties de la révolte. Poèmes vibrants, prêts à mordre le ciel et la terre, pour que s’épanouisse l’humanité.

 

Embruns d’exils et Brises de Sédition

 

Embruns de sédition et Brises d’exils, deux recueils aux titres et contenus enflammés fracturés fracassés jusqu’à devenir fragrances dans la mémoire du poète. Deux titres interchangeables. Ce poète est un exilé révolté, en rogne contre les dictatures dans le monde parce qu’il en a gardé une blessure de jeunesse.

La dictature de Salazar, qui a provoqué l’exil définitif de Gomes, a provoqué aussi, dans les années soixante, un bond important de l’immigration portugaise vers la France. Outre ceux qui fuyaient la misère, un nombre considérable de jeunes fuyaient la guerre coloniale portugaise en Afrique.

Le père Vala, portugais pas engagé mais encombrant personnage pour la dictature en place, prit le chemin de l’exil à pied jusqu’au Pas de Calais ; suivi plus tard par l’enfant José qui débarqua parmi les troubadours de la place de la Bastille, comme un rendez-vous avec l’histoire. Échanger l’espace naturel contre le béton réducteur n’était pas gai.

La misère, physique et morale, est le fruit des dictatures. Et partout des séditions aux goûts de sang suivis d’exils barbelés.

José a mal de ces silences qui font trop de bruits dans sa tête, silences complices de toutes les injustices sur terre qu’il ne peut taire.

José, c’est comme si j’ose m’aventurer en moi-même ! Il s’en va dans le crépuscule de ses textes raviver la cendre des révoltes pour que soit réhabilité l’humain. Il ne s’agit pas de révoltes vaines mais plutôt de révoltes essentielles ! José est un ange déchu, c’est un humain d’avance, même pas un combat d’avant-garde puisque l’humanité est en danger ! Vala est une histoire d’émigration qui n’a pas de fin puisque les humains ont toujours faim et sûrement auront toujours faim, de pain et de liberté ! José Vala est un poète qui chante et griffe les parois rocheuses, pour dire que les peuples opprimés veulent vivre, pendant que les oppresseurs se défoulent à réduire les révoltes spontanées et les dissidences improvisées.

Je ne dirais pas l’embarras des bien-pensants ni la joie des mal classés. J’enrage avec Oser comme verbe à propager parmi les foules dépersonnalisées.

Il n’y a pas de poésie-misère ni de révolution abîmée. La vie est permanente et la liberté en est l’oxygène. L’humain est le type qui se conjugue sans temps ni tempo ! Il ne cherche qu’à vivre dignement sur terre comme sa conscience le lui dicte.

Et si j’osais ? Ainsi chaque ami prend le relais et vulgarise le combat de José, l’ami mal parti pour bien finir parmi les sans monnaies et les sans frontières.

Les mots, ces pinces douleurs et attrape rumeurs, sont nos ciments intellectuels et nos surfaces de chutes.

Nos langues, un prolongement de l’humain au de-là de ses angoisses qui murent ses espaces.

Tout fait mal à José. Ses chants sont dédiés aux enfants de Ghaza, de Sabra et chatila à La Palestine occupée, aux paysans sans terre du brésil et d’ailleurs, au peuple grec, le Chili, et à tous les résistants antifascistes. À Matoub le chantre kabyle assassiné…

 

Debout, à quelque mètre du buste de Gomes, je me réveille d’une longue rêverie, pour retrouver la place Lumumba silencieuse, vide des cris des enfants et des rires des adultes. La pandémie du covid- 19 a imposé son silence. Le confinement des populations s’est décrété de lui-même au pays du mouvement citoyen pacifique. Le pouvoir n’a pas osé dicter sa loi, les différentes franges du mouvement ont débattu jusqu’à l’ultime limite de la raison avant de décider d’adapter les actions citoyennes aux exigences de l’heure. La prévention et la solidarité pour combler les déficits de nos gouvernants illégitimes.

Ma déambulation se poursuit vers le port pour questionner le large. Le large inspire. La pandémie continue sa propagation, presque une fatalité et l’humanité s’angoisse de se regarder mourir. Entre-t-elle dans une nouvelle ère de contrôle et de soumission ? 1 984 ne serait plus loin. Le mouvement citoyen n’allait-il pas se disloquer dans les relents pandémiques, terminer sa course en « embruns de dissidence » et de « brises d’exils »… Ou déboucher sur une nouvelle citoyenneté plus performante ? Des échos nous parlent de préméditation et de complot planétaire. José habite sa page facebook pour dire la mobilisation citoyenne volontaire et son refus de capituler aux injonctions militaristes. Construire une humanité consciente à l’ombre d’un virus de laboratoire. Toute crise est opportunité.

Plus loin, le port vide, la plage déserte et l’aéroport fermé. Aucune mouette en vue ni avion au décollage. Le silence règne. Est-ce le début ou la fin ? Les certidoutes de José nous accompagnent. Bonne lecture, nous vivons confinés dans nos réseaux, déjà, bien avant, ce connard de virus.

 

Mhamed Hassani

Écrivain

 

 

José Vala est né en 1957 au Portugal, est venu, enfant, partager l’exil de son père en France. Musicien, il interprète ses textes et a publié deux recueils de poésie chez L’Harmattan – poètes des cinq continents, en 2016 (Embruns d’exils) et en 2019 (Brises de sédition).

José Vala capte son inspiration sur les chants de la vie, les champs de coton d’hier et d’aujourd’hui, les murs de toutes les prisons, déverrouille les quatre vents de convictions en mouvement, libère les cris surpris sur les murs de toutes les prisons. Qu’il utilise la voix ou le silence, il met la guitare en résonance de l’écrit sur des textes extraits de ces recueils.

 

 

 

 


[1] Manuel Teixeira Gomes fût président de la République du Portugal entre 1923 et 1925.

[2] António de Oliveira Salazar, né le 28 avril 1889 à Vimieiro et mort le 27 juillet 1970 à Lisbonne, est un homme d'État portugais.

[3] Patrice Lumumba est un homme d'État congolais, premier Premier ministre de la République démocratique du Congo de juin à septembre 1960.  l'une des principales figures de l'indépendance du Congo belge.

[4] Kamel Eddine Fekhar, né le 1ᵉʳ janvier 1963 à Ghardaïa et mort le 28 mai 2019 à Blida, est un médecin et militant politique algérien berbère amazigh mozabite, emprisonné à plusieurs reprises et est décédé à l'hôpital de Blida après une grève de la faim

[5] Chanson de l’artiste Djamel Allam, né le 26 juillet 1947 à Ilmaten en Algérie et mort le 15 septembre 2018 à Paris, est un chanteur et musicien algérien d’expression kabyle

[6] Sahki Hacène chercheur en langue ta maziqht

[7] Lounès Matoub,né le 24 janvier 1956 à Taourirt Moussa, Beni-Doualla, mort assassiné le 25 juin 1998 à Thala Bounane, est un chanteur, musicien, auteur-compositeur-interprète et poète algérien d'expression kabyle

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